3 ans ! 3 ans depuis ma dernière critique de concert. Certains m'ont même crû mort. Alors, c'est vrai, il s'en est fallu de peu. La semaine dernière encore, je me suis rendu compte que j'avais les symptômes d'un AVC. Afin de vérifier que je n'étais pas déjà décédé, je suis même allé m'enquérir sur internet de ce qu'il en était. Bien m'en a pris puisque j'ai pu apprendre que j'avais du diabète, que mon cerveau était touché (c'est pas vraiment une surprise) entraînant une défaillance de mon système nerveux, que je souffrais d'hyperthyroïdie, que mon canal carpien était endommagé, et que j'étais une femme de plus de cinquante ans. Le dernier point ayant fait trop mal à ma virilité (et étant deux fois plus jeune), je décidai qu'il était temps d'arrêter de lire les articles de Doctissimo et de commencer ma critique. Mais voilà, le concert ayant eu lieu samedi soir, je ne pouvais pas encore commencer à la rédiger cqfd...
« Que s'est-il passé depuis 3 ans ? » te demandes-tu, adoré lecteur. Allons, allons, c'est excessivement personnel. « Pourquoi nous as-tu abandonnés ? ». - Désolé d'avoir d'autres activités. « Tu as réellement vécu trois ans sans aller voir de concerts ? » - Mais bien sûr que non ! J'ai notamment été voir Metallica au Stade de France et King Gizzard & The Lizard Wizard à l'Alexandra Palace à Londres. J'aurais pu en faire des articles mémorables tant il s'est passé de choses remarquables durant ces deux périples, mais comme je l'écrivais tout à l'heure, le temps me manquait à l'époque. Mais depuis jeudi dernier, heureux lecteur que tu es, je me sens comme la reine des neiges, ou plus simplement comme le chante Jon Crosby « I'm free, i'm free, i'm free ». Je vais enfin pouvoir réécrire de temps en temps quelques critiques dont tu pourras te délecter. Spoiler alert, il est fort possible qu'au mois de mai un nouvel article soit écrit suite à une nouvelle expédition (si je n'ai pas fait d'AVC entre temps bien entendu).
Mais je te sais déjà impatient de découvrir qui a eu la chance de me recevoir dans son public...
Ayant déménagé il y a trois ans (tiens, ni vu, ni connu, je réponds en partie à ta première question), je devais aller à la salle de concert par un moyen motorisé (j'aurais pu y aller à pieds ou en vélo, mais j'ai décidé de ne pas y arriver transpirant afin d'éviter de me faire attaquer par une meute de hyènes croyant renifler une bête faisandée).
La première partie devait débuter à 20h00 et c'est pour cela que mon chauffeur arriva à 18h30 ; une heure et demi pour faire quatre kilomètres semblait judicieux. Quelle ne fût pas ma surprise quand je vis que celui-ci n'était autre que le chanteur de MoodSwing Whiskey (pas Jeff Buckley hein, nous sommes bien d'accord qu'il est décédé depuis 25 ans et qu'il n'est pas prévu qu'il revienne à la vie tout de suite, non, je parle de MoodSwing Whiskey un projet local voué à l'international sous peu et dont l'album sera disponible sur les plate formes de streaming cette semaine. Je salue d'ailleurs chaleureusement celui qui a été son manager pendant quelques semaines, totalement bénévolement, le saint-homme. Je sais qu'il souhaite garder l'anonymat et je n'en dirai donc pas plus sur celui qui est à mon sens le plus grand génie de tous les temps).
Nous ne nous attardâmes pas en plus de civilités que nécessaire et tracèrent la route sans attendre. A mi-chemin, soit deux kilomètres plus tard, mon chauffeur eu besoin de se ravitailler en carburant, pas pour sa voiture mais bien pour lui. Nous nous arrêtâmes donc dans une auberge pour qu'il puisse se désaltérer. Le tavernier l'accompagna et pour ne pas gaspiller les bouteilles entamées, je les aidai volontiers à les terminer. Au bout de quelques temps, la faim se fît sentir et une tomme de Saint Nectaire (qui se fît sentir également) en fût la victime. Enfin repus, nous reprîmes notre route non sans amener avec nous l'aimable tavernier. Je pris place à l'arrière de la limousine (je sens déjà certains esprits chagrins qui diront que je me suis embourgeoisé depuis trois ans et que je ne porte plus la voix du peuple et qu'il faut mettre ma tête sur une fourche et qu'il faut me faire subir les pires outrages et …... holà, holà mollo ! la limousine était en fait un fourgon dont la deuxième rangée de siège avait été enlevée. J'ai même dû déménager en banlieue, c'est dire... alors, que je n'entende plus ce genre de propos à mon encontre ! vive le prolétariat ! merci d'avance, cordialement, votre serviteur, fermons cette parenthèse de quelques lignes qui s'imposait pour remettre quelques pendules à l'heure). Une fois le parking dépassé, le chauffeur me demanda où il fallait qu'il se gare. La quinzaine de voitures sur celui-ci pouvant en accueillir 4000, augurait du fait que l'on pourrait se garer facilement un peu plus loin. Ce qui fût fait sans problème. Arrivés avec trente minutes de retard, il fallait maintenant espérer que la file d'attente ne soit pas trop longue et que le contrôle des entrées soit rapide. Pour la file d'attente, soyons honnêtes, le nombre de voitures pouvait nous donner une indication assez rassurante. Masques en place, pass sanitaires affichés sur le téléphone et places à la main, nous entrâmes sans encombre. La dame de l'accueil me permit même d'enlever mon masque sans que je lui demande quoi que ce soit. Une fois dans la salle de concert, je compris que le risque de cluster était limité ; une cinquantaine de personnes à tout casser, installée devant des fûts transformés en tables sur lesquels étaient disposées des bougies, disséminée deci delà de la salle applaudissait l'artiste en place.
Celui-ci la remerciait et quittait la scène. Voici pour Ali Veejay, première première partie du concert. Au moins personne n'osera se plaindre du fait que j'ai été trop long pour en critiquer la performance.
Alors que je tentais de trouver un peu de logique à tout ça, j'entendis une guitare. C'était la deuxième première partie qui venait d'entrer en scène sous le nom de Luis Francesco Arena. Un cinquantenaire à la barbe poivre et sel entonnait des chansons plutôt mélancoliques d'une voix assez aiguë, en anglais, seulement accompagné de sa guitare boostée par un écho maximal. Le très bon niveau de guitare et l'écho donnaient l'impression que le chanteur n'était pas seul sur scène. Le moment était plaisant jusqu'à la dernière chanson chantée malheureusement en français. Le chant très aiguë en français passe moins bien pour moi, affaire de goût peut-être me diras-tu mais mon chauffeur acquiesça quand je lui fit part de mon désarroi sur ce dernier morceau.
Il était temps de faire une pause pour débriefer en plein air de ce début de concert, accompagnés de nouvelles bières. Lors de celle-ci, j'appris par mon chauffeur que, pris par le concert, je ne m'étais pas aperçu qu'un des membres du public avait négligemment lancé avec un brin d'agacement un « …mais on entend que toi !», à l'encontre de mon tavernier, non avare semble-t-il de commentaires sur cette première partie. Notant cette remarque et profitant de l'air frais mais assez doux pour un mois d'octobre, nous commençâmes à refaire le monde. Mais n'ayant pas pris de notes, je ne pourrai faire de compte rendu de ce point. Au bout d'un certain temps, nous vîmes que nous étions seuls dehors et réalisâmes que le concert de Mathieu Boogaerts avait débuté. Il était enfin temps d'aller voir celui qui devait être la star de la soirée.
Le cheveu court et mal rasé, il était en train de chanter en anglais une chanson que je ne connaissais pas, comme d'ailleurs toutes celles qui suivirent dans la même langue. Il faut dire que mes connaissances sur Mathieu Boogaert sont assez minces et qu'en ce moment je me partage plutôt entre Rammstein et Clara Luciani. Heureusement après quelques remerciements toujours dans la langue d'Andy Cairns, il commença son répertoire en français et je puis alors me rendre compte que j'en connaissais un peu plus que je ne le pensais. A coté de lui, se tenait son unique accompagnateur, un joyeux drille facétieux à lunettes et en robe noire, un certain Vincent Mougel connu (pour les initiés, donc pas par moi avant d'avoir fait une recherche sur le personnage...) pour son projet Kidsaredead. Les deux acolytes enchaînaient des titres pop folk aux rythmes me faisant penser à mes origines kényanes uniquement équipés de leur guitare qu'ils s'échangeaient au gré des morceaux. De temps en temps, Mathieu Boogaerts enfilait une espèce d'anorak et un gant bleu qui fit frissonner (parfois de plaisir ?) les amateurs de contrôle de prostate ; Cet attirail lui permettant par l'intermédiaire d'un micro de faire des percutions en tapotant ou en y frottant son costume de nylon.
Tous les sièges étant occupés, assez vite, mes deux comparses décidèrent de s'asseoir par terre au premier rang. De mon coté, je préférais rester à coté de la cheminée pour observer à la fois le public et la scène avec un maximum de recul afin de pouvoir te retranscrire avec le plus de fidélité possible ces instants musicaux. Bien vite, bien qu'à quelques mètres du tavernier et malgré la musique, je compris la remarque exprimée par le membre du public quelques minutes plus tôt. Je décidai alors d'aller m'asseoir au plus près du spectacle. Bien m'en pris puisque je pu alors assister au tavernier's show.
En effet, quand Mathieu Boogaerts posait des questions au public, il était le premier à lui répondre. A un moment, le chanteur demanda au public s'il voulait qu'il chante un titre en particulier. Le tavernier hurla « JAMBE !! » sous les yeux écarquillés de l'assemblée. Que nenni, le troubadour s'exécuta et commença à chanter. C'est alors que notre demandeur entra dans une étrange allégresse, un peu comme un enfant rencontrant le Père Noël. [Note au lecteur : Pour réellement apprécier ce passage et mieux visualiser cette transe, je t'invite à écouter ce titre.] Le tavernier pourtant assis, se mit à rebondir sur ses fesses au rythme du morceau et bras et index tendus à l'horizontal (rien à voir avec Keen'v) il repris avec le chanteur les « 1 ! 2 ! 3 ! 4 ! » et les « tourne! tourne ! tourne!» et les « etc etc ….. » bref il repris toute la chanson... Mon chauffeur ne voulant pas être en reste et actuellement en train de rénover sa demeure, quémanda à son tour un titre fort à propos : « le ciment » proposa-t-il d'une voix calme mais franche. Là encore, le Père Noël d'un soir, s’exécuta et sortit le morceau de sa hotte sous l'approbation de mes deux acolytes. Un enfant, le seul masqué dans la salle, s'étant assis à coté d'eux, se mis à taper dans ses mains. Le malheureux n'étant pas au niveau du tavernier, était souvent à contre temps, ce qui troubla notre interprète. Le tavernier qui avait pris l'habitude de rythmer tous les morceaux en frappant ses cuisses, lui fit alors l'honneur de lui donner un cours de percussion. Le concert pouvait s'achever sous les applaudissements d'un public heureux d'avoir passé un bon moment. Étonnamment il n'y eut aucun rappel, à ma grande déception. Je regrette aussi de ne pas avoir entendu une des rares chansons que je connaissais de ce chanteur et le fait que celui-ci ait moins de charisme que son excellent accompagnateur. Mes partenaires de soirée tentèrent d'aller discuter avec Mathieu Boogaerts mais ils essuyèrent un refus cinglant de la part de l'organisation. Il ne purent pas non plus acheter de souvenir puisqu'il n'y avait rien à vendre. Bien déçus, ils ne pouvaient repartir comme ça chez eux tête basse après une si bonne soirée. Ils décidèrent alors d'aller boire un dernier verre dans un bar proche. Un serveur avec une moustache en forme de guidon de vélo nous accueillis et nous informa du manque de breuvage houblonné. Nous nous rabattîmes alors sur du triple sec pour le tavernier et vers un cocktail maison pour les autres, chaudement recommandé par mon chauffeur. Une fois, la soif étanchée, il était temps de reprendre la même chose pour en apprécier les subtilités. Notre tavernier quant à lui demanda deux pintes d'eau et de la nourriture, ce qui ne décontenança pas le serveur qui revint avec la commande sans sourciller. Celle-ci consommée nous pûmes rejoindre nos pénates réfléchissant aux prochains concerts que nous pourrions aller écouter
Pour les plus curieux, voici des vidéos des références citées :